Comment rendre sa société juridiquement attractive pour des investisseurs ?
- Pauline Koch
- il y a 3 jours
- 5 min de lecture
Les fondateurs d’une société ont souvent une bonne idée en tête. Mais une fois la société créée et les premiers mois écoulés, ils réalisent rapidement qu’il leur faudra des financements pour concrétiser cette idée… et donc faire appel à des investisseurs.
Qu’ils soient individuels (business angels, family & friends), issus de fonds d’investissement (venture capital ou private equity) ou institutionnels (Bpifrance, collectivités territoriales), ces investisseurs ne se contenteront pas d’un bon projet : ils attendent aussi une structuration juridique solide et rassurante.
Dans cet article, je vous explique comment une organisation juridique bien pensée peut séduire les investisseurs et accélérer le développement de votre entreprise.
Structurer la gouvernance de l’entreprise de manière claire et efficace
Structurer la gouvernance de l’entreprise de manière claire et efficace est une étape cruciale pour assurer une gestion fluide et éviter des blocages potentiels. Par exemple, dans une entreprise où les rôles et responsabilités ne sont pas définis, les décisions peuvent se retrouver retardées, voire paralysées, en cas de désaccord.
Une gouvernance bien structurée permet non seulement de clarifier les responsabilités de chacun, mais aussi de garantir une prise de décision rapide et cohérente, essentielle pour naviguer sereinement dans un environnement en constante évolution.
Définir une gouvernance transparente
Peu importe la forme juridique de la société, la gouvernance doit être clairement établie. L’organigramme décisionnel doit être accessible aux tiers, de façon à éviter l’opposabilité à la société de décisions prises par des personnes non mandatées.
Le rôle de chacun, surtout dans des sociétés dont les règles légales sont plus souples (par exemple, la SAS) doit être clairement défini.
La mise en place d’un comité exécutif ou stratégique est fortement recommandée et rassurante pour les investisseurs car il indique que l’entreprise a la capacité de prendre des décisions importantes de manière efficace et rapide.
Les statuts et le pacte d’associés doivent ensuite distinguer les décisions qui seront prises par les dirigeants seuls et celles qui supposent l’accord (préalable ou non) d’un conseil d’administration ou comité exécutif, ou des actionnaires.
Prévoir un mécanisme de gestion des conflits
Dès la création d’une société, il est essentiel, en complément des statuts, de formaliser tous les accords entre associés dans un pacte d’associés et, en particulier, de prévoir des clauses de gestion des conflits.
Il existe plusieurs types de clauses qui permettent d’anticiper des situations sensibles et d’éviter que l’entreprise ne se retrouve paralysée : des clauses de médiation, des clauses de sortie anticipée, des clauses de « buy or sell ». Leur mise en place doit être soigneusement pensée avec l’aide d’un professionnel.
Protéger la valeur de l’entreprise
La valeur de l’entreprise se retrouve généralement en trois endroits : (i) son/ses fondateur(s) ; (ii) ses actifs (e.g., ses droits de propriété intellectuelle) et (iii) les contrats auxquels elle est partie.
Assurer la continuité de l'engagement des fondateurs et des hommes clés dans l'entreprise
L’engagement du ou des fondateurs sur la durée est un point clé pour un investisseur. L’investisseur investit dans le(s) fondateur(s), d’autant plus lorsque son investissement intervient peu de temps après la création de l’entreprise.
Cela peut se traduire par une « lock-up period », correspondant à une période pendant laquelle les fondateurs ne peuvent pas céder leurs titres de la société.
S’agissant des hommes clés, la mise en place de clauses d’exclusivité, de non-concurrence et de non-débauchage est fortement recommandée.
Protéger les actifs de l’entreprise
Les actifs de l’entreprise doivent, d’une part, être la propriété de l’entreprise elle-même et, d’autre part, être protégés juridiquement.
Par exemple, il est fréquent qu’en début d’aventure, le fondateur enregistre le nom de domaine ou la marque qui sera utilisé(e) ensuite par la société à son nom propre. Si tel est le cas, cela ne doit être que transitoire et rapidement régularisé pour éviter un transfert futur de marque qui pourrait être, selon la valeur de la société, lourd de conséquences.
En outre, l’ensemble des actifs de la société devra être protégé. Ainsi, la société devra déposer dans les meilleurs délais aux offices compétents les demandes d’enregistrement de brevets et autres droits de propriété intellectuelle nécessaires à l’activité de l’entreprise.
Garantir la durabilité des contrats auxquels l’entreprise est partie
Les contrats importants (ou « material agreements ») auxquels la société est partie seront scrutés par les investisseurs.
Si l’entreprise loue ses locaux, un contrat clair et stable est indispensable. Un bail commercial avec tacite reconduction ou un préavis long permet d’en assurer la continuité.
De même, si elle exploite des droits appartenant à des tiers, des contrats de licence solides et durables devront être mis en place.
Enfin, si le chiffre d’affaires de la société repose principalement sur la prestation de services, les contrats devront prévoir un préavis en cas de rupture par le client, étant précisé qu’il est peu recommandé d’être mono-client.
L’ensemble des contrats doit être clair, équitable et juridiquement solide pour convaincre un investisseur.
Assurer la conformité juridique et réglementaire de votre entreprise
La compliance joue désormais un rôle clé dans les investissements. Avant tout investissement, les investisseurs potentiels vont souhaiter effectuer un audit de l’entreprise afin de vérifier sa conformité avec la loi et les différentes réglementations en vigueur.
Sécuriser vos obligations sociales et fiscales
Dès la création de l’entreprise, celle-ci doit se conformer à ses obligations fiscales et faire toutes les déclarations nécessaires.
De même, dès l’embauche de son premier salarié, l’entreprise doit respecter l’ensemble de ses obligations sociales et, en particulier, définir la convention collective applicable, établir un contrat de travail et payer les cotisations sociales, etc.
Le respect (ou non) de ses obligations sera vérifié avant chaque investissement et, de mon expérience, peut être la cause de l’échec d’une opération, les sanctions financières pouvant être importantes.
Respecter les normes applicables à votre secteur
Le dirigeant doit se tenir informé – directement ou par le biais d’un conseil juridique – de la réglementation en vigueur et de son évolution.
Il doit vérifier si son activité est réglementée au sens de la loi et nécessite un accord préalable des autorités gouvernementales, et, le cas échéant, l’obtenir dès avant la création de l’entreprise.
Il doit également s’assurer de la conformité de l’entreprise au RGPD.
La mise en place d’un audit régulier, soit en interne, soit par le biais d’un conseil juridique externe, est recommandé pour garantir la conformité.
Conclusion
Rendre une société juridiquement attractive pour des investisseurs ne repose pas uniquement sur la solidité de son business model. Cela implique une structuration juridique rigoureuse, une gouvernance claire, des documents bien pensés et un environnement contractuel et réglementaire sécurisé.
En anticipant les attentes des investisseurs et en mettant en place les bons outils dès le départ, les fondateurs renforcent non seulement la crédibilité de leur entreprise, mais aussi sa capacité à croître sereinement.
Un accompagnement juridique adapté permet de gagner en efficacité et de sécuriser chaque étape du développement de l’entreprise, avant, à et après l’entrée d’un investisseur.
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